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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/365

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permettiez de parler avec franchise. Il y a de trop grands germes de divisions entre votre frère et vous, pour que vous deveniez jamais amis ; mais je ne vois pas qu’il soit nécessaire que vous soyez toujours ennemis mortels. — Je ne suis pas l’ennemi de mon frère, capitaine Jekill… je ne l’ai jamais été… son ami, je ne puis l’être, et il ne sait que trop bien quelle insurmontable barrière sa conduite a élevée entre nous deux. — Je connais, » répliqua le capitaine d’un ton significatif, « je connais votre malheureuse querelle. — Alors, » reprit Tyrrel en rougissant, « vous devez comprendre avec quelle peine je me sens forcé d’entamer un pareil sujet avec un étranger… un étranger, ami et confident d’une personne qui… mais je ne veux pas blesser vos sentiments, capitaine Jekill, et je tâcherai plutôt de contenir les miens. En un mot, je vous prie d’être assez bon pour me communiquer sur-le-champ l’objet de votre visite, attendu que j’ai besoin de me rendre ce matin aux Eaux afin d’y régler certaines affaires qui me touchent de près. — Si vous faites allusion au motif qui vous a empêché de vous rendre sur le terrain où vous avait appelé sir Bingo Binks, cette affaire est déjà complètement arrangée. J’ai déchiré de ma propre main l’insolent placard, et je me suis déclaré responsable de votre honneur contre quiconque oserait à l’avenir le mettre en doute. — Monsieur, » dit Tyrrel fort surpris, « je vous suis bien obligé de votre intention, d’autant plus que j’ignore comment j’ai pu mériter votre intervention. Néanmoins elle ne me satisfait pas entièrement, attendu que je suis habitué à être moi-même gardien de mon honneur. — Tâche facile, je présume, dans tous les cas, monsieur Tyrrel, mais particulièrement dans la présente occasion où vous ne trouverez personne d’assez hardi pour l’attaquer… À la vérité, mon intervention eût été trop officieuse et sans justification possible, si la mission dont je suis chargé ne nécessitait des rapports très intimes entre nous. Dans l’intérêt de ma propre réputation, il devient nécessaire que la vôtre demeure sans tache. J’ai appris la vérité de toute l’affaite par mon ami, lord Étherington, qui doit remercier le ciel toute sa vie de l’avoir empêché de commettre un grand crime. — Votre ami, monsieur, a eu dans le cours de sa vie bien des occasions de remercier le ciel, mais plus encore d’implorer son pardon. — Je ne suis pas théologien, monsieur, » répliqua le capitaine avec vivacité ; « mais j’ai entendu dire qu’on pouvait appliquer cette remarque à tout le monde. — Moi, du moins, je ne soutiendrai pas le contraire. Mais poursuivons. Avez-vous trouvé le moyen, capi-