Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/40

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

paraît combattre pour la bonne cause, et que des puissances surhumaines lui ont présagé le succès. — Osez-vous bien me parler de la sorte, sire ménestrel, » s’écria de Valence d’un ton menaçant, « lorsque vous savez qui je suis, et quel poste j’occupe ! — Votre dignité personnelle et votre autorité, répliqua Bertram, ne peuvent changer le bien en mal, ni empêcher que les décrets de la Providence ne s’exécutent. Vous savez, je le présume, que Douglas, au moyen de différents stratagèmes, est déjà parvenu à s’emparer trois fois du château. Vous savez aussi que sir John de Walton, le gouverneur actuel, l’occupe avec une garnison triple en forces : il lui a été promis que si, sans se laisser surprendre, il peut s’y maintenir malgré les efforts des Écossais pendant une année et un jour, il obtiendra pour récompense la libre propriété de l’immense baronnie de Douglas. Si, au contraire, pendant ce même espace de temps, il laisse reprendre cette forteresse, soit par ruse soit par force ouverte, comme la chose est successivement arrivée à tous les gouverneurs du Château dangereux, il pourra être dégradé comme chevalier, et proscrit comme sujet : les officiers qui se renfermeront avec lui dans le château, et qui serviront sous ses ordres, partageront aussi sa gloire ou son châtiment. — Je sais tout cela ; et je m’étonne seulement que, devenues publiques, ces conditions soient répétées avec tant d’exactitude. Mais quel rapport peut avoir ceci avec l’issue du combat, si le hasard voulait que Douglas et moi nous nous rencontrassions ? Je ne serai certainement pas disposé à combattre avec moins d’ardeur parce que je porte ma fortune à la pointe de mon épée, ni à devenir un lâche parce que je combats pour une partie des domaines de Douglas, aussi bien que pour la renommée et la gloire. Et après tout… — Écoutez ! un ancien ménestrel a dit que dans une injuste querelle il n’est pas de véritable courage : l’illustration qui en revient, mise en balance avec une honnête renommée, n’a pas plus de valeur qu’une chaîne de cuivre comparée à une chaîne d’or pur. Mais je vous prie de croire que je ne garantis rien dans cette importante question. Vous savez comment James de Thirlwall, le dernier commandant anglais, avant sir John de Walton, fut surpris dans le château, et comment le château fut saccagé au milieu des actes de la plus révoltante barbarie. — Je crois que toute l’Écosse et toute l’Angleterre ont entendu parler de cette boucherie et de l’infâme conduite du chef écossais, qui fit transporter au milieu d’une forêt l’or, l’argent, les munitions, les armes et tout ce qu’il était possible d’enlever, et détruisit tout le reste des provi-