Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/312

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’on plaça sur mon bureau me fit prendre le métier en horreur : il s’agissait, figurez-vous, d’une vente de suif, entre un boucher et un fabricant de chandelles, et je m’aperçus que l’on s’attendait à me voir salir la bouche, non seulement des noms vulgaires de ces artisans, mais encore des termes techniques, des expressions et des phrases dégoûtantes de leur sale profession. Sur mon honneur ! mon cher monsieur, je n’ai jamais pu depuis supporter l’odeur d’une chandelle. »

Tout en s’indignant, comme on devait s’y attendre, du vil usage auquel on avait voulu faire descendre les talents du baronnet, M. Glossin s’offrit pour remplir les fonctions de clerc ou d’assesseur : il ne demandait qu’à être utile : « Il vous suffira, dit-il à sir Robert, d’avoir une idée générale de l’affaire ; et, en premier lieu, il ne sera pas difficile, je pense, de prouver le fait principal, savoir que cet individu a tiré ce malheureux coup de fusil. S’il le niait, monsieur Charles Hazlewood pourrait nous fournir des preuves, j’imagine ? — Le jeune Hazlewood n’est pas ici aujourd’hui, monsieur Glossin. — Alors nous prendrons le serment du domestique qui l’accompagnait, dit le subtil Glossin ; mais, en vérité, je ne crois pas qu’il ose nier le fait. Je crains davantage que, d’après la manière trop favorable et trop indulgente dont j’ai entendu dire qu’il a plu à monsieur Hazlewood de rendre compte de l’affaire, la rencontre ne puisse être regardée comme accidentelle, et la blessure comme involontaire, si bien que le drôle pourrait être mis sur-le-champ en liberté pour aller faire plus de mal encore. — Je n’ai pas l’honneur de connaître la personne qui remplit en ce moment les fonctions d’avocat du roi, répondit gravement sir Robert ; mais j’espère, monsieur…, je suis convaincu que le seul fait d’avoir blessé le jeune Hazlewood d’Hazlewood, même par inadvertance, sera considéré (pour présenter l’affaire dans son jour le plus doux, le plus favorable, le plus invraisemblable) comme un crime qui serait trop légèrement puni par un emprisonnement, et qui mérite au moins la déportation. — Sans doute, sir Robert ; je partage entièrement votre opinion : mais, je ne sais comment cela se fait, j’ai remarqué que les tribunaux d’Édimbourg, et même les officiers de la couronne, se piquent d’une extrême impartialité, et ne montrent aucun égard pour la naissance et la noblesse ; je craindrais… — Comment, monsieur, manquer d’égard pour la naissance et la noblesse ! Pouvez-vous croire que cette doctrine soit professée par des hommes bien nés, par des hommes qui ont reçu une éducation