Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/350

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nuit quand il arriva à Hazlewood. Ce qu’il vit en y entrant confirma pleinement les paroles de la sibylle.

Trente chevaux de dragons étaient sous un hangar près des cuisines, encore tout bridés ; trois ou quatre soldats montaient la garde, tandis que les autres se promenaient en long et en large devant la maison avec leurs grands sabres et leurs grosses bottes. Hazlewood demanda à l’officier qui les commandait d’où ils venaient.

« De Portanferry. — Y avez-vous laissé une garde ? — Non ; nous sommes venus tous ici par ordre de sir Robert Hazlewood, pour défendre sa maison contre une attaque dont le menacent les contrebandiers. »

Charles Hazlewood alla sur-le-champ trouver son père. Après lui avoir présenté ses respects, il s’enquit du motif pour lequel il avait envoyé chercher la force armée : sir Robert l’assura que, d’après des renseignements, des avis, des nouvelles, qui lui avaient été communiqués, exposés, il avait les meilleures raisons de penser, de croire, d’être convaincu qu’une attaque serait tentée, exécutée cette nuit contre le château d’Hazlewood par une bande de contrebandiers, d’Égyptiens et d’autres bandits.

« Et pourquoi, mon cher père, la fureur de ces gens-là se dirigerait-elle plutôt sur notre maison que sur toute autre du voisinage ? — Mais je pense, monsieur, je suppose, je présume, avec tous les égards dus à votre sagesse, à votre expérience, que la vengeance de ces gens-là s’exerce, se dirige particulièrement contre les personnes les plus importantes, les plus distinguées par le rang, les lumières, la naissance et la fortune, qui ont arrêté, réprimé, puni leurs forfaits, leurs tentatives illégitimes, illégales et criminelles. »

Le jeune Hazlewood, qui connaissait le faible de son père, répondit que sa surprise venait d’un motif autre que celui que sir Robert supposait, mais qu’il s’étonnait seulement qu’on songeât à attaquer une maison où il y avait tant de domestiques, et où une foule de voisins viendraient, au moindre signal, apporter du secours. Il ajouta qu’il craignait que la réputation de sa famille ne souffrît un peu de ce qu’on appelait pour la protéger les soldats qui devaient garder la douane, comme si les Hazlewood n’étaient pas en état de se défendre eux-mêmes. Il donna même à entendre que leurs envieux feraient un sujet d’éternelles plaisanteries d’une précaution qui aurait été inutile.

Sir Robert fut surtout frappé de cette dernière objection ; car, comme tous les esprits étroits, il ne craignait rien tant que le ridi-