Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/133

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suada d’échanger contre une action dans cette séduisante entreprise ! il y aurait eu de quoi acheter avec elles la charge d’un homme en échantillons minéralogiques. »

En parlant ainsi, il s’assit, dans l’enfoncement du salon, devant une table où les productions minérales étaient posées, et se mit à les examiner, murmurant et faisant des exclamations de mépris toutes les fois qu’il en prenait une et la remettait à sa place.

Pendant ce temps, Lovel que cette occupation d’Oldbuck laissait dans une espèce de tête-à-tête avec miss Wardour, saisit cette occasion de lui adresser ces paroles d’une voix basse et interrompue : « J’espère que miss Wardour voudra bien attribuer à des circonstances presque irrésistibles la présence d’une personne qui a lieu de croire que sa visite est si peu agréable ici.

— Monsieur Lovel, répondit miss Wardour sur le même ton de précaution, j’espère que vous n’abuserez pas,… je vous crois même incapable d’abuser des avantages que vous donnent les services que vous venez de nous rendre, services qui, en ce qu’ils concernent mon père, ne peuvent jamais être assez reconnus, assez payés… Si monsieur Lovel pouvait me voir sans que le repos de sa vie en fût troublé, s’il pouvait me regarder comme une amie, comme une sœur, personne ne serait et, d’après tout ce que j’ai entendu dire de monsieur Lovel, n’aurait droit à être reçu avec plus de plaisir ici. Mais… »

Lovel répéta intérieurement les anathèmes d’Oldbuck contre la maudite conjonction mais. « Pardonnez-moi si je vous interromps, miss Wardour ; vous ne devez pas craindre que je vous importune de nouveau en vous parlant d’un sujet sur lequel j’ai déjà été si sévèrement rebuté ; mais contentez-vous de repousser mes sentimens sans vouloir ajouter à tant de rigueur en exigeant que je les désavoue…

— Vous m’embarrassez cruellement, monsieur Lovel, par votre… comment dirai-je ? je ne voudrais pas employer un mot qui vous blessât… par votre persévérance romanesque et sans espoir… C’est pour vous-même que je plaide en ce moment, pour que, réfléchissant que votre pays réclame vos services et vos talens, vous cessiez d’abandonner votre imagination aux illusions dangereuses d’un attachement mal placé, et de perdre un temps qui, désormais mieux employé, doit vous conduire à l’avancement et à des distinctions prochaines. Permettez-moi d’ajouter que vous prendriez une digne résolution…