Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 7, 1838.djvu/179

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— Eh bien ! grâce à Dieu, il n’y a pas de danger à présent pour le petit espace qui nous en reste. »

En parlant ainsi, Oldbuck les conduisit par un sentier escarpé qui les mena bientôt sur la place où les ruines étaient situées. C’est ici qu’ils vécurent, continua l’Antiquaire, consacrant entièrement leur temps à éclaircir des points de la plus haute antiquité, copiant des manuscrits, et composant de nouveaux ouvrages pour l’instruction de aà postérité.

— Et, ajouta le baronnet, à exercer les rites de la dévotion avec une pompe et des cérémonies dignes des ministres des autels.

— Et si son excellence feut le permettre, dit l’Allemand en s’inclinant humblement, les moines faisaient aussi des expériences très curieuses tans leurs laporatoires, soit de chimie, soit de magie naturelle.

— Il me semble, dit le ministre, qu’ils avaient assez affaire de recueillir les dimes et redevances de trois bonnes paroisses.

— Il est vrai, dit miss Wardour en jetant un regard malin sur l’Antiquaire, qu’ils n’étaient pas importunés par le sexe féminin.

— Vous avez raison, ma belle ennemie ; c’était un paradis où aucune Ève n’était admise ; ce qui doit redoubler notre étonnement que nos bons pères aient pu le perdre. »

Tout en faisant des réflexions de ce genre sur les occupations des anciens possesseurs de ces ruines, ils errèrent quelque temps d’une pierre moussue à une autre, sous la conduite d’Oldbuck, qui leur détaillait avec assez de vraisemblance le premier plan de l’édifice, leur lisant et leur expliquant les vieilles inscriptions dont on retrouvait encore les traces sur les tombes des morts ou au dessus des niches dans lesquelles avaient été jadis placées les images des saints.

« Par quelle raison, dit enfin miss Wardour, la tradition ne nous a-t-elle conservé que si peu de chose sur les anciens habitans de ces majestueux édifices élevés avec tant de frais et de soins, et dont les propriétaires furent dans leur temps des personnages si redoutables par leur pouvoir et leur importance ? La plus petite tourelle d’un baron ou d’un écuyer pillard, qui vivait de sa lance ou de son épée, est consacrée par le souvenir de quelque légende, et le moindre pâtre vous dira avec exactitude le nom et les faits de ses anciens possesseurs ; mais demandez à un paysan des renseignemens sur ces vastes et magnifiques débris, sur ces clochers, sur ces arcs-boutans, ces fenêtres en ogive, élevés à si grands frais, il vous