Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/29

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gham avait déterré une vieille épée, et, descendant au plus vite dans l’arène, se précipita sur le proscrit avec une telle fureur, et le poussa si vivement, qu’il le jeta hors du terrain limité. Pendant quelque temps Rob-Roy ne reparut pas dans le village, M. Mac-Oregor Stirling, dans sa nouvelle édition du Stirlingshire de Nimmo, adoucit un peu cette anecdote, tout en mentionnant la mésaventure de Rob-Roy.

Il éprouva quelquefois des échecs et courut de grands dangers personnels. Dans une circonstance remarquable, il ne fut sauvé que par le sang-froid de son lieutenant Macanaleister ou Fletcher, le Little John[1] de sa troupe, beau et intrépide garçon, renommé comme tireur. Mac-Gregor et sa bande ayant été surpris par un corps nombreux de cavaliers et de fantassins, le chef avait crié : « Dispersez-vous[2]. ». Chacun alors ne songea plus qu’à soi ; mais un hardi dragon s’attacha à la poursuite de Rob, l’atteignit et lui porta un coup de sabre. Une plaque de fer cachée dans son bonnet empêcha Mac-Gregor d’avoir la tête fendue jusqu’aux mâchoires ; mais le coup était si violent qu’il fut terrassé. En tombant il s’écria : « Oh ! Macanaleister, n’a-t-elle plus rien dans le ventre ? » (c’est-à-dire, sa carabine). Le soldat lui disait au même instant : « Le diable vous emporte ! ce n’est pas votre mère qui a tricoté votre bonnet de nuit ! » et levait le bras pour lui porter un second coup quand Macanaleister fit feu et lui logea sa balle dans le cœur.

Quoi qu’il en soit, les succès de Rob-Roy dans sa profession sont ainsi racontés par une personne de bon sens et de talent qui, placée dans le cercle de ses déprédations guerrières, en avait sans doute ressenti les effets. Il est donc naturel qu’elle n’en parle pas avec cet enthousiasme qu’inspire aujourd’hui leur caractère romanesque.

« Cet homme (Rob-Roy Mac-Gregor) avait une rare sagacité, et était aussi rusé qu’adroit. S’étant abandonné à toute espèce de licence, il se mit à la tête des brigands, des vagabonds et des gens sans aveu de ce clan, dans l’extrémité occidentale des comtés de Perth et de Stirling, et désola toutes ces contrées par ses rapines et ses brigandages. De tous ceux qui demeuraient à sa portée, c’est-à-dire à la distance d’une expédition nocturne, peu d’habi-

  1. Le Petit-Jean, ou le page de Robin-Hood. a. m.
  2. Split and swquander, dispersez-vous, c’est-à-dire, éparpillez-vous de manière à pouvoir vous réunir tous au premier appel. a. m.