Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/40

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Un funeste pouvoir qui tâche à me détruire,
En rencontre un plus fort qui veut me conserver.
Mon corps tout languissant, ma triste et froide masse
Reçoit une chaleur qui vient fondre sa glace ;
Et la nature usée abandonnant mes jours,
Je vis sans elle encor par de nouveaux secours.
Je vis, et chez un autre est le fond de ma vie ;
Je ne suis animé que de feux empruntés ;
Ma machine ne va que par ressorts prêtés ;
Ma trame désunie
Se reprend et se lie
Par des esprits secrets qu’inspirent ses beautés.
N’enviez pas, Seigneur, ces innocentes aides
Que nous savons tirer de nos derniers désirs.
Les sentimens d’amour sont pour nous des remèdes,
Et pour vous des plaisirs.
Notre exemple, pour vous, n’est pas encore à suivre.
Par diverses raisons nous nous laissons charmer ;
Dans l’âge où je me vois, je n’aime que pour vivre :

Il vous reste du temps à vivre pour aimer.

Je vous souhaiterais un siècle, si je ne savois que les hommes extraordinaires ont plus de soin de leur gloire, que de leur durée.

Soutenez jusqu’au bout la gloire d’une vie
Qui fait l’amour d’un sexe, et de l’autre l’envie ;
Unissez les talens d’un abbé singulier,
Avec les qualités d’un rare chevalier ;
Joignez le chevalier au comte,
Et qu’on trouve un héros, qui mon héros surmonte.
Abbé, vous sûtes plaire à ce grand Richelieu :
Vous plûtes, chevalier, au foudre de la guerre.