Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/331

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dites lui que le livre de Job et le livre des Maximes sont mes seules lectures. Vous ne serez pas remerciée, puisque vous ne voulez pas l’être ; mais la reconnoissance ne perd rien au silence que vous m’imposez. Que je vous dois de choses, ma très-aimable ! » (8 mars 1666.)

Lorsque le bruit courut qu’une liaison secrète de Mme Scarron avec le maréchal d’Albret (Miossens), enlevoit cet ami à la reine des Tournelles, elle voulut s’en expliquer avec Ninon, en lui écrivant le 18 juillet : « Le maréchal d’Albret est mon ami de tous les temps. Je ne sache pas qu’il ait été mon amant. Quand on vous a servi, belle Ninon, on devient d’une délicatesse extrême. Je le vois tous les jours ; et vous savez bien qu’on peut le voir sans danger. Vous vous plaignez de son absence : je suis trop fidèle à l’amitié, pour que vous puissiez vous en prendre à moi. Venez souper, ce soir, chez moi, et préparez votre vengeance. Mme de Fiesque et Mme de Coulanges ont fait partie de mettre le maréchal de belle humeur. Je vous attends, à moins que le marquis n’y mette obstacle. Menez-le, si vous ne portez pas votre luth ; mais songez bien qu’il nous faut votre luth ou le marquis. » Voilà bien la vraie Mme Scarron, dans son bon temps. Une lettre d’elle à l’abbé Têtu, postérieure de quelques années, nous la montre, avec le même esprit enjoué, s’enrôlant dans la dévotion. C’est la femme habile, refléchie, mais honnête, qui entre dans une voie nouvelle. « Mon directeur, dit-elle, m’a ordonné de me rendre ennuyeuse en compagnie, pour mortifier la passion qu’il a aperçue en