Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/60

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sés durent se roidir, au péril de leur popularité dans le monde. La lutte fut d’autant plus difficile, qu’il y eut un moment, où précieux et précieuses, se liguèrent, par une sorte d’affiliation, répandue non-seulement dans Paris, mais encore dans les provinces, où le goût des lettres et de la bonne compagnie commençoit à s’établir, par imitation. Il faut avoir vu de près les livres en faveur, à ce moment, pour juger le pitoyable abus d’esprit où l’on étoit tombé. On ne sauroit apprécier les services qu’a rendus, alors, la critique armée du fouet du ridicule, et soutenue de la puissance de la publicité.

La Comédie des académistes eut un autre mérite : celui de défendre la prose, à cet instant attaquée avec une sorte de succès, par une coterie de poëtes détestables, et à leur tête par Chapelain, dans la bouche duquel la comédie met ces deux vers bien frappés :

La prose est trop facile ; et son bas naturel
N’a rien qui puisse rendre un auteur immortel.

Il est avéré que, sur ces divers points, il y eut momentanément un excès de recherche académique donnant une juste prise à la censure ; et ceux même qui soutenoient la bonne cause, eurent peine à se défendre de céder quelque chose au goût dominant14. La fermeté inflexible de Port-Royal, presque seule y résista ; mais ce qui a tout sauvé, mieux que Port-Royal encore, c’est l’opinion15.



14. Voy., à ce sujet, quelques bonnes pages de l’Hist. de la littér. franç., de M. Nisard, tome II.

15. Voy. les Mémoires de Mme de Maintenon, rédigés par La Baumelle, tome I, page 133.