Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 2.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

bien qu’elle ait des caractères que les fausses religions n’ont pas ; autrement Zoroastre, Brama 85, Somonacodom et Mahomet seraient aussi croyables que Moïse et jésus Christ. Cependant la foi divine elle-même, quand elle est allumée dans l’âme, est quelque chose de plus qu’une opinion, et ne dépend pas des occasions ou des motifs qui l’ont fait naître ; elle va au-delà de l’entendement, et s’empare de la volonté et du cœur pour nous faire agir avec chaleur et avec plaisir, comme la loi de Dieu le commande, sans qu’on ait plus besoin de penser aux raisons, ni de s’arrêter aux difficultés de raisonnement que l’esprit peut envisager.

30. Ainsi ce que nous venons de dire sur la raison humaine, qu’on exalte et qu’on dégrade tour à tour, et souvent sans règle et sans mesure, peut faire voir notre peu d’exactitude, et combien nous sommes complices de nos erreurs. Il n’y aurait rien de si aisé à terminer que ces disputes sur les droits de la foi et de la raison, si les hommes voulaient se servir des règles les plus vulgaires de la logique et raisonner avec tant soit peu d’attention. Au lieu de cela, ils s’embrouillent par des expressions obliques et ambiguës, qui leur donnent un beau champ de déclamer, pour faire valoir leur esprit et leur doctrine : de sorte qu’il semble qu’ils n’ont point d’envie de voir là vérité toute nue, peut-être parce qu’ils craignent qu’elle ne soit plus désagréable que l’erreur, faute de connaître la beauté de l’auteur de toutes choses, qui est la source de la vérité.

31. Cette négligence est un défaut général de l’humanité, qu’on ne doit reprocher à aucun en particulier. Abundamus dulcibus vitiis, comme Quintilien[1] le disait du style de Sénèque[2] ; et nous nous plaisons à nous égarer. L’exactitude nous gêne, et les règles nous paraissent des puérilités. C’est pourquoi la logique vulgaire (laquelle

    taire sur la création d’après la Genèse et un traité De perenni philosuphia, où il prétend retrouver dans les philosophes païens toutes les idées chrétiennes. P. J.

    Morxay (Du Plessis), personnage illustre dans la politique et dans la guerre, ami de Henri IV. On a de lui, entre autres ouvrages, un Traité de la vérité de te religion chrétienne, Anvers, 1680, in-S° ainsi (lue des Mémoires (4 vol. in-4") et des Lettres (1624) d’un haut intérêt. P. J.

  1. Quintiuen, critique célèbre du premier siècle de notre ère. On a de lui les Institutiones oratoriœ dont la première édition est de 1470, in-fol. Gédoyn en a donné une traduction française (Paris, 1718, in-1"). P. J.
  2. Sénèque (Lucins Amueus Seneca), philosophe romain de l’école stoïcienne et ministre de Néron, naquit à Cordoue vers l’an II de l’ère chrétienne, mort en l’an 66, par ordre de l’empereur. Ses principaux ouvrages sont les Lettres à Lucilius le De Providentiel ; le De Bene/iciis les Quwsliones nataralcs. P. J.