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raissait comme bariolée d’oripeaux grotesques. Je me mourais songeant aux naïves et chantantes sources des bois, embuissonnées de romarins et d’anémones.

« — Oh ! la pauvrine ! s’apitoya, frissonnant, un papillon aux ailes rayées d’or.

«… Enfin, il vint un pauvre, génial et bon qu’on appelait Lélian. C’était un poète, car ses haillons éblouissaient et ses yeux et son front s’illuminaient d’étoiles. Dans des parcs de rêve il me chuchota, tremblant et doux, des choses divines. Il me voulut libre et belle et il brisa les tabernacles et les temples : sur leurs ruines sa Lyre humaine cadença d’impérissables stances d’amour. Puis jetant au vent ma vaine parure, il me voulut encore vivante et nue. Et j’en devins plus resplendissante. Ce fut mon immortel libérateur. Mes lèvres retrouvèrent alors la pure expression des hymnes divins, et libre, et belle, nue et vivante, je m’en fus éperdue, dans les bois et les monts, parmi les mauves satinées et les cascades éternelles.