Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/139

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draient me faire prendre des vessies pour des lanternes ! La lanterne éclaterait comme une bombe et porterait le deuil aux environs ! »

Après de tels discours, il ne lui restait plus qu’à rouler sous la table, et ce dénoûment était assez prévu. Mais le colonel appartenait à une génération d’hommes robustes, accoutumés à plus d’un genre d’excès, aussi forts contre le plaisir que contre les dangers, les privations et les fatigues. Lorsque Mme Renault remua sa chaise pour indiquer que le repas était fini, Fougas se leva sans effort, arrondit son bras avec grâce et conduisit sa voisine au salon. Sa démarche était un peu roide, et tout d’une pièce, mais il allait droit devant lui, et ne trébuchait point. Il prit deux tasses de café et passablement de liqueurs alcooliques, après quoi il se mit à causer le plus raisonnablement du monde. Vers dix heures, M. Martout ayant exprimé le désir d’entendre son histoire, il se plaça lui-même sur la sellette, se recueillit un instant et demanda un verre d’eau sucrée. On s’assit en cercle autour de lui et il commença le discours suivant, dont le style un peu suranné se recommande à votre indulgence.