Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/193

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Lorsqu’il fut arrivé au monument qui commande l’entrée de la rue Royale, il s’arrêta sur le trottoir, se recueillit un instant et dit :

« Inspiratrice des belles actions, veuve du grand vainqueur de l’Europe, ô Gloire ! reçois l’hommage de ton amant Victor Fougas ! Pour toi j’ai enduré la faim, la sueur et les frimas, et mangé le plus fidèle des coursiers. Pour toi, je suis prêt à braver d’autres périls et à revoir la mort en face sur tous les champs de bataille. Je te préfère au bonheur, à la richesse, à la puissance. Ne rejette pas l’offrande de mon cœur et le sacrifice de mon sang. Pour prix de tant d’amour, je ne réclame qu’un sourire de tes yeux et un laurier tombé de ta main ! »

Cette prière arriva toute brûlante aux oreilles de sainte Marie-Madeleine, patronne de l’ex-temple de la Gloire. C’est ainsi que l’acquéreur d’un château reçoit quelquefois une lettre adressée à l’ancien propriétaire.

Fougas revint par la rue de la Paix et la place Vendôme, et salua en passant la seule figure de connaissance qu’il eût encore trouvée à Paris. Le nouveau costume de Napoléon sur la colonne ne lui déplaisait aucunement. Il préférait le petit chapeau à la couronne et la redingote grise au manteau théâtral.

La nuit fut agitée. Mille projets divers se croisant en tout sens dans le cerveau du colonel. Il préparait