Page:About - Maître Pierre, 1859.djvu/8

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

monumental : les rues, les places, les avenues, les esplanades, les constructions, rivalisent de splendeur avec ce qu’on admire à Paris. Le Grand-Théâtre, qui ne contient que 1 200 personnes, a les dehors imposants d’un colisée, et un escalier que je souhaiterais à l’Opéra. Les cafés sont des monuments ; j’ai vu un établissement de bains tout à fait monumental, avec un fronton pour les hommes et un autre pour les dames. Toutes ces grandeurs datent de Louis XV et de Louis XVI.

En ce temps-là, Bordeaux était une des capitales de la France ; car nous en avions plusieurs, et tout ne tendait pas vers Paris. On ne voyait pas nettement, comme aujourd’hui, qu’une nation centuple ses forces en les concentrant. L’Orient avait commercé avec Marseille, et de Paris se souciait fort peu. Le Brésil, les Antilles et toute l’Amérique du Sud plaçaient la France à Bordeaux. Il y avait des liens plus étroits entre Bordeaux et Saint-Domingue qu’entre Bordeaux et Paris. Avec son territoire et son fleuve, ses vins, son port, ses chantiers, ses débouchés, Bordeaux croyait être en état de se suffire. C’est ce qui explique, sans l’excuser, l’erreur des députés de la Gironde. Ils n’auraient jamais songé à affranchir Bordeaux en le séparant de la capitale, s’ils avaient su que c’était affranchir un membre en le séparant du cœur.

Bordeaux est en progrès comme le reste de la