Page:About - Rome contemporaine.djvu/18

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Dans cet état de choses, je ne ferai pas l’imprudence de décrire plus longuement une ville qui sera peut-être bouleversée demain. Marseille a cela de commun avec Paris qu’il faut renoncer à le peindre, sous peine de recommencer le portrait tous les jours. Je gage au contraire que Bordeaux est à un pavé près, ce qu’il était l’an passé au mois d’avril. Et je promets de vous faire une peinture de Rome que nos arrière-petits-neveux pourront vérifier mot pour mot, si la révolution ne s’en mêle.


Le progrès se trémousse aux environs de Marseille aussi bien que dans les rues ; il envahit du même pas la ville, les faubourgs et la banlieue la plus reculée. Cette campagne était renommée autrefois pour son aridité, et, Dieu me pardonne ! la voilà verte. Les Marseillais sont allés chercher la Durance, et ils l’ont amenée par la main jusque chez eux. L’eau circule dans toutes les maisons de la ville jusqu’à l’étage le plus élevé ; elle arrose les rues dans cette patrie de la poussière ; elle féconde les jardins, elle met de l’herbe dans les prés.

Cependant ne craignez pas que la Provence devienne une succursale du pays de Caux ; le soleil est toujours là. Il dessine sur la mer bleue les profils charmants de Ratonneau, de Pomègue ou du château d’If ; il argente finement les belles montagnes grises qui couronnent Montredon ; il fait fleurir dans les rochers le romarin et le cactus, et les asperges colossales de l’aloès ; il distille le parfum pénétrant des arbousiers et des lentisques.