Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/105

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– Je comprends, fit M. Mériset, qui flairait sous ce mystère une affaire d’État, je comprends et je me tairai.

Belle-Rose se dépouilla de ses habits, en prit d’autres qui appartenaient au neveu Christophe, s’arma d’un bâton et quitta la rue du Pot-de-Fer-Saint-Sulpice.

– C’est à M. de Nancrais que je dois ma hallebarde de sergent, se disait-il, c’est à M. de Nancrais que je la rendrai.


Au point du jour Belle-Rose se trouvait déjà à trois ou quatre lieues au delà de Saint-Denis, sur la route de Flandre. La campagne souriait sous les premières et blanches clartés du matin : de joyeuses filles passaient en chantant sur le chemin que rayaient les ombres des peupliers frémissants. Autour de Belle-Rose tout était lumière et gaieté ; tout était ténèbres et tristesse en lui. Il avait perdu son amante, il venait de perdre sa liberté, il allait sans doute perdre la vie. Son cœur se gonfla sous ce flot de pensées amères. Il avait lutté, il était vaincu. Mais la voix de sa conscience ne lui reprochait rien. Vers midi, il s’arrêta dans une espèce de cabaret ; depuis la veille il n’avait rien pris. L’hôtesse, jeune femme accorte et pétulante, eut en un tour de main fait sauter une omelette.

– Bien vous prend, mon garçon, lui dit-elle, d’être entré au coup de midi. Un quart d’heure plus tard, vous auriez couru le risque de ne plus trouver ni coquilles d’œufs ni croûte de pain. Où les gens de la maréchaussée passent, il ne reste rien.

– Ah ! fit Belle-Rose, vous attendez les gens du roi ?

– Une demi-douzaine de drôles qui ont soif comme