– M. de Louvois ?
– Lui-même.
– Alors, vous avez bien une lettre d’introduction, quelque bout de papier avec sa signature.
– Une commission, n’est-ce pas ? fit Belle-Rose sans sourciller.
– Justement.
Belle-Rose venait de prendre son parti résolument ; tandis que M. Bergame parlait, la main du lieutenant s’était glissée sous sa casaque.
– Ma commission, reprit-il, la voilà.
Et il leva un pistolet à la hauteur du visage de M. Bergame.
– Si vous dites un mot, si vous faites le moindre geste, vous êtes mort, ajouta-t-il.
Mais M. Bergame n’avait garde de crier : glacé d’effroi, il tremblait dans son fauteuil.
– Bien ! fit Belle-Rose ; voilà que vous me comprenez. Je savais bien que nous finirions par nous entendre. Que vouliez-vous ? Cent mille livres ? les voilà. Que me faut-il ? des papiers ? je les prends ; nous sommes quittes.
– Mais, monsieur, c’est un assassinat, murmura M. Bergame d’une voix étouffée par la peur.
– Ah ! monsieur, que vous voyez mal les choses ! C’est une restitution.
– Ah ! mon Dieu ! que va dire le ministre ? reprit tout bas M. Bergame, qui suivait avec terreur les mouvements de Belle-Rose.
– Eh ! mon cher monsieur, vous lui direz que vous avez terminé l’affaire avec un autre. Affaire de commerce, vraiment.
Tout en parlant, Belle-Rose avait fait sauter les serrures de l’armoire, et s’était emparé d’un paquet de papiers enfermé dans une cassette. Il y jeta un rapide coup d’œil : c’étaient des lettres jaunies par le temps et des listes chargées de noms, sur lesquelles on voyait la signature de M. de Bouteville et de M. de Condé.