Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/291

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Aussitôt la Déroute poussa ses chevaux avec tant d’adresse, que la roue donna contre l’arbre et la chaise versa du côté de l’exempt, dont Belle-Rose se fit un marchepied pour sortir du carrosse. Quatre ou cinq hommes qui semblaient surgir de terre s’élancèrent sur le chemin et coururent à la voiture comme pour aider la Déroute à la relever. Au milieu du trouble où cette chute avait jeté l’exempt, ni lui ni son camarade ne songèrent à la possibilité d’une embuscade. Les nouveaux venus avaient la mine d’honnêtes gens qui ne demandaient qu’à les secourir ; mais l’exempt et le garde, tirés de la chaise par leurs soins, furent à l’instant même garrottés et bâillonnés. Quant à Belle-Rose, il aidait Cornélius, qui n’était autre que l’homme au chariot, à se rendre maître de Bouletord.

– Soyons sage, dit Belle-Rose à l’ex-canonnier, qui, tout meurtri des coups qu’il avait reçus, écumait de rage dans une ornière ; c’est encore une partie que je gagne.

Quand l’exempt et les deux gardes furent hors d’état de se défendre, la Déroute et ses camarades s’employèrent à redresser la voiture.

– Voilà ce qui s’appelle emporter une citadelle sans brûler une amorce, dit le sergent.

Cornélius coupa les traits des chevaux qu’on débarrassa de leurs harnais ; il sauta sur l’un d’eux et conduisit les deux autres à Belle-Rose et au sergent.

– Une minute encore, dit la Déroute ; ces messieurs pourraient s’enrhumer si nous les laissions sur la route. La nuit est fraîche.

Aidé par ses camarades, il porta l’exempt et les gardes dans la voiture, cadenassa les portières et se retira après les avoir salués poliment.

– Alerte maintenant, et vous, dépêchez ! dit-il aux compagnons de Grippard, qui se jetèrent dans les champs.

La Déroute poussa les chevaux dans un petit chemin, où Belle-Rose et Cornélius le suivirent. Au bout d’un