Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/33

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droit à lui. Il ne doutait pas qu’il n’eût eu affaire à des maraudeurs du parti ennemi, mais dans son naïf sentiment d’équité, il ne doutait pas non plus que le chef ne lui fît rendre ce qu’on lui avait volé. Si le roi d’Espagne et l’empereur d’Allemagne faisaient la guerre au roi de France, ils ne la devaient pas faire aux voyageurs. À la vue d’un jeune homme qui s’avançait vers eux au pas de course, nu-tête et sans habit, le capitaine s’arrêta.

– Que veux-tu ? lui dit-il brusquement quand Jacques fut à deux pas de son cheval.

– Justice, répondit Jacques tranquillement.

Le chef sourit et passa ses longs doigts nerveux dans sa moustache.

Deux cavaliers qui le suivaient échangèrent quelques paroles rapides ; ils parlaient plutôt du gosier que des lèvres, et leur idiome frappait les oreilles de Jacques comme le croassement des corbeaux.

– De quoi te plains-tu ? reprit le chef.

– On m’a pris ma valise, l’argent, les effets qu’elle contenait, jusqu’à mes habits, tout.

– On t’a laissé ta peau, et tu te plains ! Mon drôle, tu es exigeant.

Jacques crut n’avoir pas bien entendu.

– Mais je vous dis…

– Et moi je te dis de te taire ! s’écria le chef ; tu répondras quand on t’interrogera.

Le chef se tourna vers ses officiers ; pendant leur courte conférence, Jacques se croisa les bras. L’idée de fuir ne lui vint même pas ; il lui semblait impossible qu’on lui fît plus qu’il n’avait souffert.

– Tu es Français, sans doute ? reprit le chef en revenant vers lui.

– Oui.

– De ce pays, peut-être ?

– De Saint-Omer.

– Tu dois connaître alors les chemins de traverse pour regagner les frontières de la Flandre ?