Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/92

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donc pas affaire à un homme gris, mais à un officier entêté. Le débat devenait donc plus grave.

– Voyons, mon cher, as-tu compris ? reprit le chevalier ; tourne les talons, cours aux Porcherons, demande le cabaret de la Pomme de pin et dîne copieusement, je t’invite, va !

– Mon lieutenant, je n’irai pas.

– Tu veux rester ?

– Oui.

– Ah çà, drôle, oublies-tu qui je suis ?

– Au contraire, je voudrais vous le rappeler.

– Ah ! tu fais le plaisant. Je te couperai les oreilles…

– Je n’en crois rien.

M. de Villebrais leva le bras, Belle-Rose le saisit à la volée.

– Quoi ! tu oses me toucher, coquin ? Je vais te donner de mon épée dans le ventre ! s’écria M. de Villebrais, qui, perdant toute retenue, fit un effort pour dégager sa main et prendre l’épée ; mais Belle-Rose le repoussa si vivement qu’il trébucha. Avant qu’il se fût relevé, le sergent avait déjà tiré la sienne.

Le cocher ne comptait plus, mais il sifflait toujours.

– Monsieur de Villebrais, je vous jure que vous n’arriverez à ma sœur qu’après m’avoir passé sur le corps ! s’écria Belle-Rose.

– Je ne me battrai pas avec toi et je te ferai pendre, répondit le lieutenant. Eh ! cocher, ajouta-t-il, il y a dix louis pour toi si tu aides cette adorable personne à monter en fiacre, et dix autres encore si tu la conduis au cabaret de la Pomme de pin, où j’irai bientôt la rejoindre.

Claudine voulut fuir, mais elle chancela et tomba sur ses genoux.

– C’est fait, dit le cocher en serrant la bourse que sa main caressait.

– Pas encore ! s’écria-t-on près de là ; et au même instant un inconnu parut sur le chemin.

C’était un beau jeune homme d’une figure franche et