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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/93

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décidée, et bien pris dans sa taille. Son costume, sans broderie et sans ruban, lui donnait l’apparence d’un étudiant ; mais il avait la mine et l’épée d’un gentilhomme.

– Qu’est-ce à dire ? reprit M. de Villebrais, et de quoi vous mêlez-vous ?

– J’ai dit ce que j’ai voulu, et je me mêle des affaires des autres quand il me plaît, répondit gravement l’inconnu.

Sur un geste du lieutenant, le cocher, qui hésitait depuis l’intervention inattendue du cavalier, s’avança vers Claudine. Il n’avait pas fait deux pas, que la main de l’inconnu s’appuyait sur son épaule.

– Écoute, lui dit-il : Monsieur que voilà t’a promis dix louis pour conduire mademoiselle aux Porcherons ; moi, je te promets cent coups de bâton si tu ne la conduis pas à la métairie que voilà ; mais je joindrai mon invitation à celle de monsieur pour te prier de l’aider à monter en fiacre. Comprends-tu ?

– Très bien, dit le cocher, qui sentait, à la manière dont la main du cavalier s’était appuyée sur son épaule, qu’il n’y avait pas d’objection à faire à un homme si plein d’éloquence et de vigueur. Une nouvelle conviction venait de pénétrer dans son esprit, et en néophyte zélé il courut ouvrir la portière, voulant, par son empressement, témoigner de la chaleur de sa conversion.

– Entrez, mademoiselle, reprit l’inconnu en présentant la main à Claudine, entrez ; je vous réponds des bons sentiments de cet honnête cocher. N’est-ce pas, l’ami ?

– C’est trop d’honneur, monsieur, répondit l’autre, qui se frottait l’épaule tout en fermant la portière.

L’intervention de l’étranger avait été si rapide, l’action avait si promptement suivi ses paroles, que M. de Villebrais et Belle-Rose étaient demeurés spectateurs muets de cette scène. Mais au moment où Claudine s’assit dans le fiacre, M. de Villebrais sentit se rallumer toute sa colère. Il fondit sur Belle-Rose l’épée à la main, et