Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/172

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glacé, fou de rage et de douleur. Celui-ci ne perdit pas un temps inutile à poursuivre des cavaliers qui avaient sur lui l’avance d’une journée, et courut hardiment tout raconter à Jean de Werth.

L’explosion de sa haine et de sa fureur fut telle, que Jean de Werth comprit sur-le-champ que c’était un homme dont on pouvait tirer le meilleur parti. Bien loin de le punir, il lui donna une gratification et l’adressa à sa complice, Mme la baronne d’Igomer, avec une lettre qui ne contenait que ces mots :

Voilà un coquin que je vous recommande.

Il n’en fallait pas davantage pour engager la baronne à prendre Mathéus Orlscopp à son service. Quand il y trouvait son intérêt, le seigneur Mathéus était d’une franchise terrible. Il ne cacha rien à Mme d’Igomer des circonstances qui l’avaient fait entrer dans la vie de Renaud, à Bergheim comme à Rabennest. Ce qu’il venait de faire, loin de révolter la baronne, lui donna une idée de ce qu’on pouvait attendre d’un tel homme dans l’occasion.

Ces deux haines se comprirent de prime-saut. Aussitôt que le départ de Wallenstein pour l’armée impériale fut décidé, et en se déterminant à quitter la résidence de Prague pour celle de Drachenfeld, Mme d’Igomer prit immédiatement la résolution d’en confier le commandement à Mathéus Orlscopp.

Maîtresse de Mlle de Souvigny et de Mlle de Pardaillan, elle était à Drachenfeld comme le chasseur qui tient en cage une jolie chanterelle et attend que les perdrix viennent se faire tuer. Les perdrix cette fois s’appelaient Armand-Louis et Renaud. Elle était sûre que personne ne veillerait mieux sur la cage que Mathéus Orlscopp.

Un sourire hideux rendit plus effrayante encore la physionomie de