Page:Acker - Petites Confessions, sér1, éd3.djvu/74

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nique. Un auteur dramatique, pourvu qu’il ne soit pas neurasthénique, n’a pas besoin d’avoir du talent.

Et comme je m’exclamais :

— Ce n’est pas une thèse, reprit M. Capus. Je ne suis pas un auteur à thèse, et d’ailleurs il n’y a pas de pièce à thèse... Mais non, mais non... pas même dans Dumas. Où trouvez-vous une thèse dans Dumas ? Est-ce une thèse que de prétendre dans Le Demi-Monde qu’un honnête homme ne peut épouser qu’une honnête femme ? Vraiment c’est une idée toute naturelle. Les thèses de Dumas ne sont que dans ses préfaces. Il a laissé dire que ses pièces étaient à thèse, pour doubler la curiosité des spectateurs, et c’est la critique normalienne qui l’a écrasé de tout cet appareil didactique.

— Je ne tiens pas à ce grand mot de thèse, lui dis-je. Je voudrais savoir seulement si vous êtes l’homme de vos pièces. Avez-vous réussi à ne pas devenir neurasthénique ?

— Mais oui. J’ai su attendre et j’ai toujours tâché d’arranger la vie au mieux de mes désirs. En sortant de l’Ecole centrale, j’accepte de partir comme ingénieur, pour une île lointaine, qu’un homme d’affaires avait découverte et qu’il voulait exploiter. La veille du départ, j’hérite de quelques milliers de francs. Je rentre à Paris. Heureuse initiative ! Les émigrés qui débarquèrent dans l’île y moururent de faim et d’abandon. J’oublie mon métier d’ingénieur et je me découvre journaliste. La fortune ne me souriait pas, mais je ne me