Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/66

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jamais croire que « c’était arrivé ». Cette Denise ! comme elle fut accueillie par les braves cœurs heureux de se retremper dans « quelque chose de sain ». Combien de fois, à combien d’époques différentes ai-je entendu mes contemporains résumer leur impression sur un livre dans lequel ils trouvaient des sentiments élevés, par ces mots : « Il est bien temps que les moralités intellectuelles se réveillent en présence de ce qui se passe. » Ce qui m’a fait me demander quelquefois : « Est-ce qu’il ne se passe pas toujours à peu près la même chose ? » Denise trompait, il est vrai, son mari, mais elle avait été délaissée, et elle le trompait en de si nobles vers, si sentimentaux, si idéalistes !

Quant à Baudelaire, les vers cités par ses défenseurs, si beaux qu’ils fussent, ne purent le laver à nos yeux de « l’ordure » de certains autres. Quel dégoût nous inspiraient ces pièces (six, on se le rappelle, furent condamnées à disparaître des éditions futures), où il bravait par trop en vérité, dans les mots français, notre honnêteté. Il y eut de vigoureuses et superbes indignations.

« Ce qui se passait » cette année-là fut curieux. Nous qui parlions tant de la « corruption impériale », voilà que nous approuvions les poursuites contre les Fleurs du Mal et que nous nous révoltions contre la « bégueulerie » des magistrats de Napoléon III. Il est vrai qu’il s’agissait des accusations portées contre Ma-