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HISTOIRE

que la prison militaire de l’Abbaye, détendue par un poste d’infanterie, était attaquée par le peuple. À ce moment, plusieurs élèves de l’École polytechnique arrivaient ; ils annoncent à haute voix que tous les élèves se sont divisés, pour aller, dans chaque arrondissement, concourir avec la garde nationale au rétablissement de l’ordre et au maintien de la liberté. Des cris redoublés de « Vive l’École polytechnique ! vive la réforme ! » saluent cette nouvelle, et l’on se met, aussitôt, en marche vers l’Abbaye pour aller, s’il en est temps encore, s’interposer entre le peuple et la troupe. En débouchant sur la place, la colonne voit que les insurgés sont maîtres de la prison ; ils avaient désarmé les soldats, délivré les prisonniers, et ils commençaient à démolir la maison d’arrêt. Incertains sur les dispositions de la garde nationale, ils se retirent silencieusement derrière leur barricade, établie en tête de la place, et se tiennent en observation. Le capitaine Dunoyer les, aborde et les somme de ne pas continuer une destruction inutile. Ils répondent par les cris de « Vive la garde nationale ! vive l’École polytechnique ! vive la réforme ! » « Oui, mes amis, Vive la réforme ! dit Dunoyer ; que tous ceux qui la veulent nous suivent avec ordre et discipline. » Puis, voyant que les insurgés, armés de pioches, de marteaux de forge, de pinces à démolir, de haches, de barreaux de fer et de sabres, manquent de fusils, il propose d’en aller prendre à la caserne municipale de la rue de Tournon. On se range à sa suite et l’on marche en avant, en chantant la Marseillaise.

Avec ce renfort, qui la porte environ à six cents hommes, la colonne se dirige vers la caserne de la rue de Tournon. Elle la trouve occupée par un détachement de la 11e légion. Les gardes municipaux l’ont évacuée de grand matin pour aller prendre position sur la rive droite de la Seine.

Alors, Dunoyer conduit ses hommes à la caserne des sapeurs-pompiers, rue du Vieux-Colombier, où il espère trouver des armes. La caserne est fermée ; la sentinelle se