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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

retire dans le poste. Le commandant paraît à une fenêtre du rez-de-chaussée, et, le capitaine Dunoyer lui ayant demandé des armes pour ses volontaires, il consent, après quelques difficultés, à livrer environ quatre-vingts fusils, que l’on passe à travers la grille d’une croisée. Ces fusils sont chargés ; un coup de feu part accidentellement. Plusieurs insurgés, se croyant attaqués, crient : Vengeance ! et veulent mettre le feu aux portes ; mais les gardes nationaux parviennent à les rassurer. La colonne s’ébranle et se divise en deux détachements ; cent volontaires du peuple se dirigent, par la rue du Cherche-Midi, vers la maison du conseil de guerre, bien résolus à l’enlever de vive force. Après avoir recruté sur leur chemin des hommes et des armes, ils doivent prendre par derrière la caserne de la rue de Babylone, pendant que la colonne principale, sous les ordres de Dunoyer, l’attaquera par-devant.

Mais, arrivés à l’entrée de la rue de Babylone, quelques gardes nationaux de cette colonne, ayant été reconnaître les dispositions de la caserne, apprennent que la troupe en est partie la veille et qu’il n’y a plus au poste qu’un petit nombre de jeunes soldats récemment entrés au corps. Le sergent qui parlemente avec eux propose de recevoir dans le poste quelques gardes nationaux pour le garder en commun ; il ajoute en même temps, du ton le plus ferme, que, si l’on prétend le désarmer, lui et les siens, il se défendra à outrance. Cette réponse énergique impose le respect. Le capitaine Dunoyer fait faire volte-face à sa troupe et va rejoindre avec elle le détachement qui revient du poste du conseil de guerre.

Ce poste, après une courte résistance, a été enlevé et désarmé. On a, comme partout, brûlé les portes et délivré les soldats détenus. On apprend au même moment que d’autres bandes d’insurgés ont pris les casernes de la rue Mouffetard, de la rue des Grès, de la rue du Foin, de la rue des Carmes, et désarmé tous les postes intermédiaires. Le succès du peuple est complet de ce côté de la Seine.