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INTRODUCTION.

grate, impossible, et qui, pour lui avoir été trop facile en apparence, tournera dans l’histoire à sa confusion. Il a voulu retenir une nation magnanime au niveau d’une bourgeoisie parvenue, qui, dans ce qu’elle avait de plus étroit et de plus égoïste, lui fournissait le type et, pour ainsi parler, la matière de son gouvernement. On a reproché à ce prince d’avoir manqué de grandeur ; mais ce n’est point assez : l’histoire sévère doit l’accuser aussi d’avoir manqué d’amour. Non assurément qu’il ne fût porté par nature à la bonté, à la tolérance, à une sagesse toujours inclinant au pardon ; mais sagesse et bonté demeuraient en lui stériles, parce qu’elles n’étaient point animées de cette chaleur généreuse qui fait les rois pères du peuple. Louis-Philippe n’aima point les classes laborieuses. Il les considérait comme une force aveugle dont on ne de-

    Piémont, les banques agricoles de l’Allemagne, les cités ouvrières, etc. Il a été constaté que, de 1830 à 1848, tout l’effort du gouvernement pour résoudre les questions d’amélioration sociale s’est borné à trois circulaires relatives au paupérisme, adressées par le ministre de l’intérieur aux préfets et restées dans les cartons de l’administration.

    Quant à la loi sur l’enseignement primaire, promulguée sous le ministère de M. Guizot et si vantée à son apparition, elle paraît bien timide et bien insuffisante si on la rapproche des livres de Condorcet et des idées émises au sein de la Convention (voir le rapport de Lakanal, 26 juin 1793). En ne la donnant pas gratuite et en ne la rendant pas obligatoire, M. Guizot annulait de fait cette éducation populaire dont il posait le principe avec solennité. Les instituteurs primaires, rejetés en dehors de la hiérarchie universitaire, à peine rétribués, sans aucun avancement, sans retraite assurée, se voyaient placés dans des conditions si infimes qu’il leur devenait impossible d’exercer l’influence et de remplir la mission auxquelles on semblait les appeler. Dans la discussion à la Chambre des députés, M. Salverte fit sentir une autre lacune de cette loi en demandant qu’on ajoutât au programme de l’instruction primaire la connaissance des droits et des devoirs du citoyen.