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MAURIN DES MAURES

— À se revoir, Maurin ! qui vivra verra !

Et il s’enfonça dans la forêt.

Maurin et les gendarmes arrivèrent à La Verne.

C’est un couvent d’architecture romane et qui est tout en ruines. Les encadrements des fenêtres et des portes, les clefs de voûte, les consoles, les niches, sont en belle serpentine noire de Cogolin, et, luxe sur des haillons, ornent des murs dégradés où, dans les fentes, poussent des herbes.

Le couvent est planté au bord d’un plateau qui s’avance comme un cap sur le ravin. Au-dessous de la construction, des roches verticales, murs naturels, prolongent par en bas ceux qui sont faits de main d’homme, en sorte que, du fond des ravins, le couvent paraît haut de toute la hauteur de la colline. Du pied de la roche montent, jusqu’au faîte de la toiture, des lierres collés aux murailles comme de gigantesques arborescences sur les pages d’un herbier démesuré.

Et c’est un luxe plus beau encore que les sculptures, ces lierres qui couvrent le monastère d’un manteau de velours vert aux plis pleins d’ombre, frangés par l’or et la pourpre des aurores et des couchants. Là-dedans, aux mois printaniers, nichent les oiseaux du ciel. En toute saison, ils s’y abritent et en agitent les feuillages bruissants. Les rouges-gorges batailleurs y pullulent à l’automne et y font pétiller leur cliquetis de duel pareil au battement de deux féeriques épées qui ne seraient pas plus grosses que des aiguilles.

La grive, qui aime les baies du lierre, y fait en novembre son « tsik, tsik, » léger comme l’appel d’un lutin qu’une seule feuille de pin cacherait tout entier. Les merles au bec jaune y sifflent des roulades. Les