Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
268
LA FIÈVRE D’OR.

Aussitôt que la compagnie eut touché la plage, sur l’ordre de don Luis, les rangs furent formés en quelques secondes, et le comte ayant à sa droite le colonel Florès, et à sa gauche don Antonio, qui se prélassaient auprès de lui et souriaient agréablement, conduisit sa troupe au logis qui lui avait été préparé, en fendant avec peine les flots pressés de la multitude.

Devant le logis, l’alcade mayor et le juez de lettras, c’est-à-dire les deux principales autorités de la ville, flanqués de leurs alguazils en haillons, attendaient l’arrivée de la compagnie.

En les apercevant, don Luis fit faire halte.

Alors les deux magistrats firent quelques pas au devant du comte, qui, de son côté, s’était avancé vers eux. Ils le saluèrent respectueusement et commencèrent un long discours, farci de toutes les ronflantes hyperboles mexicaines au milieu de l’emphase duquel il fut facile à don Luis de comprendre que les Sonoriens se réjouissaient du fond du cœur de l’arrivée de la vaillante compagnie française ; qu’ils plaçaient en son courage tout leur espoir pour les protéger et les défendre contre leurs féroces voisins les Apaches ; que les Français n’étaient pas débarqués sur une terre étrangère, mais au milieu de frères, d’amis sincères, qui seraient heureux d’être bientôt mis à même de leur prouver leur dévouement, et mille choses encore beaucoup trop longues à rapporter.

Lorsque l’alcade mayor eut terminé son discours au milieu des applaudissements chaleureux de la foule, le juez de lettras en commença un à son tour, tout aussi long, tout aussi diffus et tout aussi perfide