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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

ils veillent en ce moment ; que mes frères remontent à cheval et se retirent, l’heure n’est pas propice.

Les chefs firent un signe d’assentiment.

— J’irai à la découverte, dit le Visage-de-Singe.

— Bon ! répondit le Cerf-Noir avec un sourire farouche, mon frère est habile, il voit beaucoup de choses, il nous renseignera.

Le Visage-de-Singe fit un geste pour s’élancer sur un cheval qu’un guerrier lui amenait, mais tout à coup le Cerf-Noir se leva, se précipita vers lui et, lui appuyant rudement la main sur l’épaule, il le contraignit à tomber à genoux sur le sol.

Les guerriers surpris de cette agression subite dont ils ne devinaient pas le motif, échangaient entre eux des regards étonnés sans cependant faire le moindre mouvement pour s’interposer entre les deux chefs.

Le Visage-de-Singe releva brusquement la tête.

— L’Esprit du mal trouble-t-il le cerveau de mon frère ? dit-il en essayant de se dégager de l’étreinte de fer qui le tenait cloué au sol.

Le Cerf-Noir sourit d’un air sinistre, et tirant son couteau à scalper de sa ceinture :

— Le Visage-de-Singe est un traître, dit-il d’une voix sombre, il a vendu ses frères aux Visages-Pâles, il va mourir.

Le Cerf-Noir était non-seulement un guerrier renommé, mais sa sagesse et sa loyauté étaient à juste titre réputées dans la tribu ; nul ne révoqua en doute l’accusation qu’il venait de porter, d’autant plus que malheureusement pour lui le Visage-de-Singe était connu de longue date.