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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

— Serrez les rangs ! serrez les rangs !

Et les rangs se serraient et les hommes tombaient sans se plaindre, ayant fait le sacrifice de leur vie et ne combattant plus que pour gagner les quelques minutes indispensables pour que leur sacrifice ne fût pas stérile.

Vainement les rôdeurs de frontières, excités par l’appât du gain, cherchaient à briser cette résistance énergique que leur opposait une poignée d’hommes : les héroïques soldats, appuyés les uns sur les autres, les talons calés contre les cadavres de ceux qui les avaient précédés dans la mort ; semblaient se multiplier pour barrer le défilé de tous les côtés à la fois.

Cependant, désormais le combat ne pouvait longtemps durer ; dix hommes tout au plus demeuraient debout de toute la troupe du capitaine, les autres avaient succombé, mais tous frappés par devant en pleine poitrine.

Tous les arrieros étaient morts ; deux caisses restaient encore sur le bord du précipice ; le capitaine jeta un regard rapide autour de lui.

— Encore un effort, enfants ! s’écria-t-il ; cinq minutes seulement pour achever notre besogne.

— Dios y libertad ! crièrent les soldats. Et bien que épuisés de fatigue, ils se jetèrent résolument au plus épais de la foule d’ennemis qui les enveloppait.

Pendant quelques minutes, ces dix hommes accomplirent des prodiges ; mais enfin le nombre l’emporta : ils tombèrent tous !

Le capitaine seul existait encore !

Il avait profité du dévouement de ses soldats pour