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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

vingt-sept ans, d’une taille moyenne, mais parfaitement proportionnée, il portait, le grand costume de guerre de sa nation, et il était peint et armé comme s’il eût été en expédition ; son visage était beau, ses traits intelligents, empreints d’une suprême majesté, sa physionomie loyale respirait la bravoure et la bonté.

En ce moment, il semblait en proie à une agitation d’autant plus extraordinaire que les Peaux-Rouges se font un point d’honneur de ne se laisser jamais émouvoir par aucun événement quelque terrible qu’il soit, ses yeux lançaient des éclairs, sa parole était brève, saccadée, sa voix avait un accent métallique.

— Vite ! dit il, nous avons perdu trop de temps déjà !

— Qu’y a-t-il donc ? demanda Tranquille.

— Les bisons ! dit le chef.

— Oh ! oh ! s’écria Tranquille avec terreur.

Il avait compris ; ce bruit qu’il entendait depuis quelque temps déjà était causé par une manada (troupe) de bisons, qui accouraient de l’est se rendant probablement dans les hautes prairies de l’ouest.

Ce que le chasseur avait si promptement deviné, a besoin d’être brièvement expliqué au lecteur, afin qu’il puisse comprendre à quel terrible danger se trouvaient subitement exposés nos personnages.

On nomme manada dans les anciennes possessions espagnoles une réunion de plusieurs milliers d’animaux sauvages ; les bisons, dans leurs migrations périodiques pendant la saison des amours, se réunissent parfois en manadas de quinze et vingt