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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

mille individus qui forment une troupe compacte et voyageant de conserve ; ces animaux vont toujours droit devant eux, serrés les uns contre les autres, ils franchissent tout, renversent tous les obstacles qui s’opposent à leur passage : malheur au téméraire qui tenterait d’arrêter ou de changer la direction de leur course furibonde, il serait broyé comme un fétu de paille sous les pieds de ces stupides animaux qui passeraient dessus son corps sans même l’apercevoir.

La position de nos personnages était donc fort critique, car le hasard les avait placés juste en face d’une manada qui arrivait sur eux avec la rapidité de la foudre.

Toute fuite était impossible, il n’y fallait pas songer, résister était plus impossible encore.

Le bruit se rapprochait avec une effrayante rapidité, déjà on entendait distinctement les mugissements sauvages des bisons, mêlés aux aboiements des loups rouges, et aux miaulements saccadés des jaguars qui voltigeaient sur les flancs de la manada et chassaient les retardataires ou ceux qui s’écartaient imprudemment à droite ou à gauche.

Un quart d’heure à peine et c’en était fait, la hideuse avalanche apparaissait balayant tout sur son passage avec cette force irrésistible de la brute que rien ne peut vaincre.

Nous le répétons, la position était critique.

Le Cerf-Noir se rendait au rendez-vous que lui-même avait assigné au chasseur canadien, déjà il n’était plus éloigné que de trois ou quatre lieues de l’endroit où il comptait rencontrer son ami, lorsque son oreille exercée avait saisi le bruit de la course