Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/149

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me serre le cœur, un pressentiment indéfinissable me fait trembler malgré moi.

— Chassez ces idées noires, mon ami, dans quelques minutes nous serons près de votre mère.

— Oui, n’est-ce pas ? et pourtant, je ne sais si je m’abuse, mais on dirait que la campagne n’a pas son aspect accoutumé, ce silence qui règne autour de nous, cette solitude qui nous environne me semblent peu naturels, nous voici près du village, nous devrions déjà entendre les abois des chiens, le chant des coqs et ces mille bruits qui dénoncent les lieux habités.

— En effet, dit Belhumeur avec une vague inquiétude, tout est bien silencieux autour de nous.

Les voyageurs se trouvaient à un endroit où la rivière fait un coude assez brusque ; ses rives profondément encaissées, couvertes d’immenses blocs de rochers et d’épais taillis, ne permettaient pas à la vue de s’étendre au loin.

Le village vers lequel se dirigeaient les chasseurs n’était éloigné que d’une portée de fusil à peine du gué où ils se préparaient à traverser la rivière, mais il était complètement invisible à cause de la disposition des lieux.

Au moment où les chevaux mettaient les pieds dans l’eau ils firent un brusque mouvement en arrière, et les limiers poussèrent un de ces hurlements plaintifs, particuliers à leur race, qui glacent d’effroi l’homme le plus brave.