Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/150

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— Qu’est-ce là ! murmura le Cœur-Loyal en devenant pâle comme un mort et en jetant autour de lui un regard effaré.

— Voyez ! répondit Belhumeur, et du doigt il montra à son compagnon plusieurs cadavres que la rivière emportait et qui glissaient entre deux eaux.

— Oh ! s’écria le Cœur-Loyal, il s’est passé ici quelque chose d’épouvantable. Ma mère ! ma mère !

— Ne vous effrayez pas ainsi, dit Belhumeur, elle est sans doute en sûreté.

Sans écouter les consolations que son ami lui prodiguait sans y croire lui-même, le Cœur-Loyal enfonça les éperons dans le ventre de son cheval et s’élança dans les flots.

Ils arrivèrent bientôt sur l’autre rive.

Alors tout leur fut expliqué.

Ils avaient devant eux la scène de désolation la plus épouvantablement complète qui se puisse imaginer.

Le village et le fort n’étaient plus qu’un monceau de ruines.

Une fumée noire, épaisse et nauséabonde montait en longues spirales vers le ciel.

Au milieu du village s’élevait un mât sur lequel étaient cloués des lambeaux humains que des urubus se disputaient avec de grands cris.

Çà et là gisaient des cadavres à demi dévorés par les bêtes fauves et les vautours.

Nul être vivant n’apparaissait.