Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/243

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Après quelques instants, l’Indien secoua sa pipe pour en faire tomber la cendre, en passa le tuyau dans sa ceinture et fixant sur l’Espagnol un regard voilé par une expression étrange :

— Mon frère est heureux, dit-il d’une voix triste, quoique âgé déjà de bien des hivers, il ne marche pas seul dans le sentier de la vie.

— Que veut dire le chef ? demanda le vieillard, je ne le comprends pas ?

— Mon frère a une famille, reprit le Comanche.

— Hélas ! mon frère se trompe, je suis seul en ce monde !

— Que dit donc là mon frère ? n’a-t-il pas auprès de lui sa compagne ?

Un sourire triste se dessina sur les lèvres pâles du vieillard.

— Non, dit-il au bout d’un instant, je n’ai pas de compagne.

— Que lui est donc cette femme, alors ? dit le chef avec une feinte surprise en désignant la dame espagnole qui se tenait morne et silencieuse aux côtés du vieillard.

— Cette femme est ma maîtresse.

Ooah ! mon frère serait-il esclave ? fit le Comanche avec un mauvais sourire.

— Non, reprit fièrement le vieillard, je ne suis pas l’esclave de cette femme, je suis son serviteur dévoué.