Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/172

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Les Sachems échangeaient entre eux des regards sombres.

La foule regardait attentive.

Le jeune prisonnier, ne comprenant rien à ce qui se passait, demeurait impassible en apparence, mais, dans son for intérieur, il était en proie à une secrète et vive inquiétude.

Enfin, le principal Sachem fit un geste, et s’avançant majestueusement jusqu’au centre de la place, suivi par Olivier et les autres chefs de la tribu :

— Écoutez tous, dit-il en étendant le bras pour réclamer le silence. Les Piekanns, chéris du Wacondah, sont issus de la grande Tortue sacrée ; le monde repose sur leur écaille ; ils sont braves, ils sont sages, ils sont justes entre toutes les nations rouges ; mais les Piekanns sont hommes, et par cela même sujets à l’erreur : un voile était devant leurs yeux. Ils ont pris un jaguar pour un lâche coyote, un ami pour un ennemi, un espion ! mais le voile qui couvrait leurs yeux et les rendait aveugles s’est déchiré. La Panthère-Bondissante, le chasseur pâle, le frère et l’ami des Piekanns, a révélé la vérité aux Sachems de la nation ; le prisonnier est trop brave pour être un misérable espion ; d’ailleurs il est l’ami de la Panthère-Bondissante, et par conséquent c’est un guerrier loyal ; et lui aussi il est l’ami des Piekanns. La Panthère-Bondissante réclame son frère : ce frère doit lui être rendu ! Qu’il soit donc libre, que ses armes lui soient restituées ; la justice l’exige, l’honneur des guerriers de ma nation le veut. Ce guerrier est maintenant l’ami et l’hôte des Indiens Piekanns ; traitons-le donc comme tel. Ai-je bien parlé, hommes puissants ?