Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/50

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— Donc, brisons là, madame, reprit-il toujours froid et railleur. Si j’étais assez malheureux pour que vous fussiez ma mère, je vous maudirais, car je vous devrais cette vie de honte et de misère qui n’a été pour moi qu’une longue souffrance.

— Eh bien ! soit, s’écria-t-elle d’une voix brisée et à demi folle de douleur, tu ne le veux pas ; c’est bien ! Je ne suis pas ta mère, je suis une pauvre femme bien malheureuse qui va mourir désespérée si une parole consolante ne tombe pas de tes lèvres ! Dis-moi quatre mots seulement ; tu le vois, je ne suis pas exigeante je ne te demande que quatre mots ; ils me rendront l’espérance qui m’abandonne et m’ouvriront le ciel. L’épouvante me glace ! À cette heure suprême, j’ai peur ! Oh ! je t’en supplie, dis-moi, cela te coûtera si peu, Olivier, dis-moi, mon enfant, dis-moi : Madame, je vous bénis ! et je mourrai heureuse en te bénissant, moi aussi !

Olivier détourna la tête sans répondre.

— Oh ! s’écria-t-elle en joignant les mains, et les yeux pleins de larmes, resteras-tu sourd à ma prière ?

— Je n’ai ni le droit de vous bénir, ni celui de vous maudire, madame, répondit-il enfin avec un accent glacé ; je ne suis pas votre fils, je ne vous connais pas !

— Ah ! s’écria-t-elle avec désespoir, il est implacable !

Et, poussant un horrible cri d’agonie, elle retomba sans mouvement sur le lit.

Le comte se précipita dans la chambre.

— Malheureux ! s’écria-t-il d’un air menaçant, en s’élançant vers Olivier, qu’avez-vous fait ?