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DONATELLO.

moderne ces lignes si ingénues, si franches, demeurées si jeunes. Le Saint Georges a été considéré par les Florentins comme une œuvre si précieuse, qu’il fallait lui épargner même les risques de l’atmosphère que tant d’autres œuvres, dans cette ville privilégiée, vaillamment subissent. On l’a transporté au musée national et remplacé dans la niche de l’oratoire par une copie ; mais on a laissé en place le spirituel et animé bas-relief représentant saint Georges à cheval, combattant le dragon, et qui donne un avant-goût plein de fantaisie et d’abandon des bas-reliefs plus complexes où se plaira et triomphera Donatello.

Il est bon de remarquer enfin que si l’on peut s’attarder à relever quelques réminiscences, d’ailleurs si assimilées et transformées, de l’antique dans les draperies et le style du Saint Pierre et du Saint Marc, ici aucune constatation de ce genre n’est possible. C’est une création exclusive de la chevalerie, merveilleusement évoquée et ressuscitée par le statuaire florentin du xve siècle.

Si maintenant nous abordons les redoutables prophètes et patriarches du campanile, nous voyons Donatello atteindre à la plus grande intensité d’expression que son art ait donnée. Ce sont des énigmes que ces hommes, et l’on comprend que dans l’exaltation qu’ils lui causaient à mesure qu’il les voyait s’animer sous ses mains, Donatello s’écriât : « Mais parle, parle donc ! »

Ils ne parlent pas ; ils se contentent de regarder dans les profondeurs du temps, de toute l’atroce fixité de leurs