Page:Alexis de Tocqueville - L'Ancien Régime et la Révolution, Lévy, 1866.djvu/194

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de vertus publiques, et en même temps de plus de foi : la persécution l’a bien montré. J’ai commencé l’étude de l’ancienne société, plein de préjugés contre lui ; je l’ai finie, plein de respect. Il n’avait, à vrai dire, que les défauts qui sont inhérents à toutes les corporations, les politiques aussi bien que les religieuses, quand elles sont fortement liées et bien constituées, à savoir la tendance à envahir, l’humeur peu tolérante, et l’attachement instinctif et parfois aveugle aux droits particuliers du corps.

La bourgeoisie de l’ancien régime était également bien mieux préparée que celle d’aujourd’hui à montrer un esprit d’indépendance. Plusieurs des vices mêmes de sa conformation y aidaient. Nous avons vu que les places qu’elle occupait étaient plus nombreuses encore dans ce temps-là que de nos jours, et que les classes moyennes montraient autant d’ardeur pour les acquérir. Mais voyez la différence des temps. La plupart de ces places, n’étant ni données ni ôtées par le gouvernement, augmentaient l’importance du titulaire sans le mettre à la merci du pouvoir, c’est-à-dire que ce qui aujourd’hui consomme la sujétion de tant de gens était précisément ce qui leur servait le plus puissamment alors à se faire respecter.

Les immunités de toutes sortes qui séparaient si malheureusement la bourgeoisie du peuple en faisaient, d’ailleurs, une fausse aristocratie qui montrait souvent l’orgueil et l’esprit de résistance de la véritable. Dans chacune de ces petites associations particulières qui la