Page:Allais - Deux et deux font cinq (2+2=5).djvu/52

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— Le royaume des Cieux est assez riche pour n’être point à la merci même de ses plus vieux clients. Et puis… pour ce que ça nous rapporte !

— Le fait est !

— Ces gens-là n’ont même pas la reconnaissance du polichinelle… Je fais un pari qu’il y aura plus de monde, cette nuit, au Chat Noir qu’à Notre-Dame de Lorette. Veux-tu parier ?

— Mon Dieu, vous ne m’en voudrez pas, mais parier avec vous, la Source de tous les Tuyaux, serait faire métier de dupe.

— Tu as raison, sourit le Seigneur.

— Alors, c’est sérieux ? insista le bonhomme Noël.

— Tout ce qu’il y a de plus sérieux. Tu feras porter tes provisions de joujoux aux enfants des Limbes. En voilà qui sont autrement intéressants que les fils des Hommes. Pauvres gosses !

Un visible mécontentement se peignait sur la physionomie des anges, des saints et autres habitants du céleste séjour.

Dieu s’en aperçut.

— Ah ! on se permet de ronchonner ! Eh bien ! mon petit père Noël, je vais corser mon programme ! Tu vas descendre sur terre cette nuit, et non seulement tu ne leur ficheras rien dans leurs ripatons, mais encore tu leur barboteras lesdits ripatons, et je me gaudis d’avance au spectacle de tous ces imbéciles contemplant demain matin leurs âtres veufs de chaussures.