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MALHERBE
- Et qu'on n'en peut rien obtenir,
- Puisqu'à si beau dessein mon désir me convie.
- Son extrême rigueur me coûtera la vie,
- Ou mon extrême foi m'y fera parvenir.
- Si les tigres les plus sauvages
- Enfin apprivoisent leurs rages,
- Flattés par un doux traitement.
- Par la même raison pourquoi n'est-il croyable
- Qu à la fin mes ennuis la rendront pitoyable
- Pourvu que je la serve à son contentement ?
- Toute ma peur est que l'absence
- Ne lui donne quelque licence
- De tourner ailleurs ses appas,
- Et qu'étant, comme elle est, d'un sexe variable,
- Ma foi, qu'en me voyant elle avait agréable.
- Ne lui soit contemptible en ne me voyant pas.
- Amour a cela de Neptune,
- Que toujours à quelque infortune
- Il se faut tenir préparé ;
- Ses infidèles flots ne sont point sans orages :
- Aux jours les plus sereins on y fait des naufrages,
- Et même dans le port on est mal assuré.
- Peut-être qu'à cette même heure
- Que je languis, soupire et pleure,
- De tristesse me consumant.
- Elle, qui n'a souci de moi ni de mes larmes,
- Étale ses beautés, fait montre de ses charmes.
- Et met en ses filets quelque nouvel amant.
- Tout beau ! pensers mélancoliques.
- Auteurs d'aventures tragiques,
- De quoi m'osez-vous discourir ?
- Impudents boute-feux de noise et de querelle,
- Ne savez-vous pas bien que je brûle pour elle,
- Et que me la blâmer c'est me faire mourir ?
- Dites-moi qu'elle est sans reproche,
- Que sa constance est une roche.