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souvent d’un discours : quelques mots échappés des lèvres d’un homme circulent dans le monde entier, et retentissent bientôt à l’égal du tonnerre ; une parole imprudente, du haut d’une tribune, noie la terre dans des flots de sang. L’éloquence est tout : pouvoir, autorité, génie, gloire, richesse, bien, mal, source de prospérité ou cause de ruine. Le gouvernement est dans la persuasion : les lois de la rhétorique sont celles des empires ; la pensée, la parole et l’action ne sont plus qu’une même chose.

La presse est la parole écrite ; c’est la pensée revêtue du corps le moins grossier qui existe après le son, c’est l’écho de l’éloquence, le retentissement de la tribune, la voix du peuple. La presse donne à ce siècle son vrai caractère ; elle établit entre les esprits une communication vraiment miraculeuse. Par elle, les murs des enceintes parlementaires sont renversés ; la voix de l’orateur s’entend du bout d’un royaume à l’autre, que dis-je ? aux extrémités de la terre. Nos esprits se parlent, communiquent entre eux ; l’assemblée est partout et n’est nulle part ; l’orateur invisible, parcourant des distances immenses, se multiplie pour un auditoire innombrable : sa parole voyage ; chacun reçoit au même instant son âme entière ; et pour augmen-