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n’est que passion et travail, l’autre que réflexion et négligence. Rousseau sait qu’il écrit un livre, Mme de Staël veut mettre en lumière de nouvelles idées. Les sentences profondes échappent à celle-ci aussi abondamment que les traits d’éloquence à celui-là. Rousseau trouve dans le raisonnement une source d’émotions, et, grâce au tissu merveilleux de son style et à la perfection élaborée de son éloquence, sera lu et admiré aussi longtemps que vivra la langue française ; Mme de Staël ignore l’art de polir une phrase et de cadencer des périodes : elle compose des maximes ; son style est un corps disproportionné, mais vigoureux, où l’on voit moins de chair que de muscles ; elle orne ses idées avec d’autres idées. Rousseau fait des théories ; Mme de Staël, des applications ; le philosophe de Genève prépare les révolutions, la fille de Necker les raconte : l’un enseigne au peuple ses droits, l’autre aux gouvernements leurs devoirs ; celui-ci nous fait admirer le beau idéal et chimérique de l’égalité absolue ; celle-là nous invite à jouir des avantages réels et pratiques d’un gouvernement libre.

L’un des hommes qui ont le mieux appliqué aux idées et aux intérêts de ce siècle les traditions de style qu’ont laissées les grands maîtres, c’est M. Royer-Collard. On peut encore le re-