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ANTHOLOGIE FÉMININE

supplément de la beauté. Le grand malheur de la laideur, c’est qu’elle éteint et qu’elle ensevelit le mérite des femmes… C’est une grande affaire quand il faut que le mérite se fasse jour au travers d’un extérieur désagréable.

Vous n’êtes pas née sans agrémens, mais vous n’êtes pas une beauté ; cela vous oblige à faire provision de mérite ; on ne vous fera grâce de rien. La beauté inspire un sentiment de douceur qui prévient. Si vous n’avez point ces avances, on vous jugera à la rigueur. Qu’il n’y ait donc rien dans vos manières qui fasse sentir que vous vous ignorez. L’air de confiance révolte dans une figure médiocre.

Rien n’est plus court d’ailleurs que le règne de la beauté, rien n’est plus triste que la suite de la vie des femmes qui n’ont su qu’être belles. Si l’on a commencé à s’attacher à vous par l’agrément, faites qu’on y demeure par le mérite… Les grâces sans mérite ne plaisent pas longtemps, et le mérite sans grâces peut se faire estimer sans tomber. Il faut donc que les femmes aient le mérite aimable…

La beauté trompe la personne qui la possède, elle enivre l’âme. Cependant faites attention qu’il n’y a qu’un fort petit nombre d’années de différence entre une belle femme et une qui ne l’est plus… Les véritables grâces ne dépendent pas d’une parure trop recherchée. Il faut satisfaire à la mode comme à une servitude fâcheuse et ne lui donner que ce qu’on ne peut lui refuser.

Que ne doit-on pas aux agrémens de l’imagination ? C’est elle qui fait les poètes et les orateurs ; rien ne plaît