Page:Alzog - Histoire universelle de l’Église, tome 1.djvu/28

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et connue dans la société visible des fidèles, de plus en plus évidente, de l’imprimer de plus en plus profondément dans la conscience des hommes, d’établir de plus en plus son empire et son autorité dans les mœurs publiques et privées, dans la famille et dans l’État, dans la science et dans l’art. Au point de vue protestant, la vérité objective ne se trouvant que dans l’Église invisible ne peut jamais se réaliser complètement dans l’Église visible, et par conséquent ne peut être que plus ou moins entrevue dans le développement de l’histoire. Quelle influence n’a d’ailleurs pas exercée, n’exerce pas encore le protestantisme sur la manière de juger l’état ecclésiastique, institué par Jésus-Christ même, sa hiérarchie, le célibat, les priviléges le la virginité ! Aussi Schleiermacher a-t-il dit avec raison : Tels les principes, les convictions, telle l’histoire, et surtout l’histoire de l’Église : elle diffère avec les partis, les sectes, les écoles philosophiques. Chacun voit selon ses préjugés, et fait l’histoire non selon ce qu’elle est, mais selon ce qu’il la voit.

§ 5. — Histoire ecclésiastique universelle et particulière.

L’idée d’une histoire universelle ne pouvait être complétement conçue, encore moins réalisée, dans l’antiquité antérieure au Christianisme. Polybe en avait, il est vrai, un pressentiment, quand il disait : L’histoire spéciale (ἡ ϰατὰ μέρος ἱστοέρα (hê kata meros histoera)) est isolée, sans liaison, sans but commun avec l’ensemble ; l’histoire universelle, au contraire (ἡ ϰαθόλου ἱστορία (hê katholou historia)), forme un tout organique (σωματοειδὴς (sômatoeidês)) vivifié par une unité intérieure. Quand on connaîtrait également tous les États et tous les peuples de la terre, cela ne suffirait pas pour reconnaître l’organisation et la marche du monde, pas plus que l’observation des membres isolés du corps ne peut donner la connaissance de la force et de la beauté de l’ensemble. Il faut, pour obtenir une vue claire de l’ensemble, saisir les rapports intimes qui unissent tous les peuples dans un but commun (συντέλεια τῶν ὅλων (sunteleia tôn holôn)). Mais c’est en vain qu’on cherche dans Polybe la réalisation de cette idée : on ne l’y trouve pas plus que celle de la promesse de Diodore de Sicile, qui s’était engagé à rassembler aussi compléte-