Page:Anatole France - Balthasar.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

quelque malin voisin glisse dans leur nitée un…

Son petit-fils l’interrompit avec violence. Il était pâle, ses mains tremblaient.

— Ne l’écoute pas, me cria-t-il. Tu sais ce que je t’ai dit. Ne l’écoute pas !

— C’est positif, répétait monsieur Le Mansel en fixant de côté son œil rond sur l’œuf pourpre.

La suite de mes relations avec Alexandre Le Mansel ne présente rien qui mérite d’être conté. Mon ami me parla souvent de ses vers à Tiphaine, mais il ne me les montra jamais. D’ailleurs je le perdis bientôt de vue. Ma mère m’envoya terminer mes études à Paris. J’y passai mes deux baccalauréats et j’y étudiai la médecine. Dans le temps que je préparais ma thèse de doctorat, je reçus une lettre de ma mère qui m’annonçait que ce pauvre Alexandre avait été très malade et qu’à la suite d’une terrible crise il était devenu craintif et défiant à l’excès, qu’il restait d’ailleurs tout à fait inoffensif et que, malgré le trouble de sa santé et de sa raison, il montrait une aptitude extraordinaire pour les mathématiques. Ces nouvelles n’étaient pas pour me surprendre. Bien des fois, en étudiant les troubles des centres nerveux,