Page:Anatole France - Balthasar.djvu/162

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— Je n’en demande pas davantage, pour vous obliger, ma petite princesse.

— Alors, reprit Abeille, mettez d’autres cerises dans le chapeau de mon frère et vous aurez une autre pièce d’or.

Ce fut fait. La paysanne continua son chemin en se demandant dans quel bas de laine, au fond de quelle paillasse elle cacherait ses deux pièces d’or. Et les deux enfants suivirent leur route, mangeant les cerises et jetant les noyaux à droite et à gauche. Georges chercha les cerises qui se tenaient deux à deux par la queue, pour en faire des pendants d’oreille à sa sœur, et il riait de voir ces beaux fruits jumeaux, à la chair vermeille, se balancer sur la joue d’Abeille.

Un caillou arrêta leur marche joyeuse. Il s’était logé dans le soulier d’Abeille qui se mit à clocher. À chaque saut qu’elle faisait, ses boucles blondes s’agitaient sur ses joues, et elle alla, ainsi clochant, s’asseoir sur le talus de la route. Là, son frère, agenouillé à ses pieds, retira le soulier de satin ; il le secoua et un petit caillou blanc en sortit.

Alors, regardant ses pieds, elle dit :

— Petit frère, quand nous retournerons au lac, nous mettrons des bottes.