Page:Anatole France - Balthasar.djvu/251

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Et elle se mit à pleurer. Ses larmes coulaient sur la joue de Georges, et c’étaient des larmes de bonheur ; elle y mêlait des éclats de rire et mille mots charmants qui n’avaient point de sens, pareils à ceux que bégayent les petits enfants. Elle ne songeait pas que la vue de son bonheur pouvait attrister le cœur du roi Loc.

— Ma bien-aimée, lui dit Georges, je vous retrouve telle que je le désirais : la plus belle et la meilleure des créatures. Vous m’aimez ! Grâce au ciel, vous m’aimez ! Mais, Abeille, n’aimez-vous point aussi un peu le roi Loc qui m’a tiré de la prison de verre où les Ondines me gardaient loin de vous ?

Abeille se tourna vers le roi Loc :

— Petit roi Loc, tu as fait cela ! s’écria-t-elle ; tu m’aimais et tu as délivré celui que j’aimais et qui m’aimait…

Elle n’en put dire davantage et tomba à genoux, la tête dans ses mains.

Tous les petits hommes, témoins de cette scène, répandaient des larmes sur leurs arbalètes. Seul, le roi Loc gardait un visage tranquille. Abeille, lui découvrant tant de grandeur et de bonté, se sentait pour lui l’amour d’une